La prière des déportés Nous souhaitons qu'enfin ,revenue sur la terre, La paix rétablisse des lendemains qui chantent, Que ne s'agite plus le spectre de la guerre, Que l'on ne revoit plus les malheurs qui nous hantent, Exaucez le rêve qui nous a fait survivre, Voir les peuples se tendre une main amie, Donnant à l'être humain l'espérance de vivre, Plutôt que refléter la haine de notre ennemie. Cinquante cinq ans que nous sommes revenus, Après avoir connu l'indicible souffrance, De n'être dans les camps que pauvres pantins nus, Des forçats qui souvent frôlaient la déchéance. A quoi auraient servi la chevauchée sanglante, Les morts et les tortures,tout le mal enduré, Si renaissait encor' le sombre enfer de Dante, Vision hallucinante où beaucoup ont sombré. La liberté pour nous est un joyau sans prix, Un bijou que l'on garde en soi jalousement, Peu d'êtres humains peuvent en être aussi épris, Parce que nous l'avons gagnée par delà les tourments. Faîtes enfin que règne à jamais la tendresse, Pour que la vie à tous ne soit plus que sourires, Que toujours soit finie,pour l'homme la détresse, C'est la prière de ceux qui furent des martyres. Et quant aux inconnus nous livrons notre lyre, Ce n'est que pour montrer,qu'au-dessus des laideurs, Il est un ciel d'amour fait d'immenses grandeurs. Les déportés sont ceux,qui d'un rien,d'un sourire, D'une étoile d'argent,d'un printemps virginal, D'une fleur,d'un rayon,bâtissent l'idéal. Je n'ai qu'une rose pourtant à vous offrir, Une simple rose tissée dans la souffrance, Elle se veut Mémoire,mais aussi Souvenir, De celles,de ceux morts pour que vive la France. Gabriel Badoinot.